Notre lettre 165 publiée le 12 février 2009

A BOUGIVAL, DANS LE DIOCESE DE VERSAILLES, UNE RECEPTION TRES ETONNANTE DU MOTU PROPRIO DE BENOIT XVI : UN EXEMPLE QUI NOUS ECLAIRE TOUS POUR COMPRENDRE LES SITUATIONS DE BLOCAGE QUE NOUS RENCONTRONS DANS NOS DIOCESES

Il est de bon ton de croire que le diocèse de Versailles est un diocèse qui se montre généreux à l’égard des fidèles attachés à la liturgie traditionnelle de l'Église. A y regarder de prêt, on s’aperçoit que des situations d’exclusion et d’injustice y sont plus nombreuses qu'ailleurs (Notre Dame de Versailles, Saint Germain en Laye, Maisons Maisons-Laffitte, Poissy, Montfort-l'Amaury, Bougival…) et qu’une opposition du clergé tente d’empêcher la demande des fidèles de s’exprimer. Le nombre de lieux de culte traditionnel est bien loin de suffire à contenter l’énorme demande et bien des diocèses de province sont proportionnellement mieux lotis en terme d’accueil de la demande que ce grand diocèse de l’ouest parisien.

Alors que plus personne ne doute de la volonté du Saint Père de voir appliquer généreusement les bienfaits du Motu Proprio Summorum Pontificum dans les paroisses (« Je ne doute pas que vous puissiez parvenir, en temps raisonnable, à des solutions satisfaisantes pour tous, afin que la tunique sans couture du Christ ne se déchire pas davantage » disait le Saint Père au sujet de l’application du Motu Proprio dans son discours aux évêques de France du 14 septembre 2008), de nombreux pasteurs continuent à repousser les demandes des fidèles qui souhaitent pouvoir assister à la messe célébrée selon la forme extraordinaire du rite romain dans leur paroisse.
Dans le meilleur des cas, on tolère la réserve indienne, chère à Monseigneur Eric Aumônier ; mais du Motu Proprio dans les paroisses, non !!!

Cette situation est incompréhensible pour les hommes de bonne volonté qui ne se satisfont pas de l’apartheid liturgique en vigueur dans la plupart des diocèses de France.

Le dossier que nous vous présentons aujourd’hui concerne la paroisse de Bougival dans le diocèse de Versailles. Il est très significatif du peu de cas que nos pasteurs font des fidèles.
Avec de tels pasteurs, il n’est pas difficile de dire ensuite « le motu proprio ne fait pas recette, circulez y a rien à voir ! »
En effet, à Bougival, en dépit d’une demande ancienne, nombreuse, locale et respectueuse, le curé vient de faire part de sa réponse négative, s'appuyant sur des motivations bien surprenantes...

Tout d'abord un peu d'histoire…

Il est bien connu dans la paroisse de Bougival que de nombreuses familles sont attachées à la messe traditionnelle.
Aussi, lorsqu'en février 2008 une demande formelle fut présentée au Père Boidot, curé de cette paroisse, ce ne fut pas une surprise pour lui. Il parut même à l’époque assez favorable à cette demande.
Sa réponse fut très simple : d’une part le Père Boidot souhaitait se donner du temps pour apprendre à célébrer cette liturgie, ne voulant pas d’un prêtre extérieur et d’autre part, le Père Boidot sollicitait des demandeurs qu’ils s'investissent sur la paroisse, qu’ils ne soient pas une communauté à part, car déclarait-il, il n’était pas « le chapelain d’une communauté, mais le curé d’une paroisse unie ».
En somme, il ne restait au Père Boidot qu’à définir le rythme d’une célébration de la forme extraordinaire du rite romain dans sa paroisse avec son conseil paroissial. Une telle mise en place devait être étudiée d’ici à l’automne dernier.
Enfin, il demandait expressément que cette démarche ne soit pas mentionnée par « Paix Liturgique ».


Huit mois plus tard, au début du mois de septembre 2008, sans nouvelles de leur curé, les demandeurs se sont tournés à nouveau vers leur pasteur.
Lors d'un très bref entretien, le Père Boidot les a informés qu'il souhaitait garder la maîtrise de l'information auprès de ses autres paroissiens - c'est-à-dire qu'il ne souhaitait pas que les demandeur fassent publicité de leur souhait - mais que les choses avaient évolué car il avait appris à célébrer cette messe pendant l'été. Ainsi, il disait compter commencer à célébrer la messe traditionnelle à Bougival à un moment qu'il estimerait opportun, après l'avoir annoncé à toute la paroisse à une période qu'il déterminerait lui-même (a priori au moment de l'Avent précisait-il).
A ce moment, les fidèles demandeurs étaient donc tout à fait rassurés malgré la « forte opposition au sein du conseil pastoral » dont se plaignait le Père Boidot, même s’il savait lui-même qu’il y avait aussi un fort soutien dans sa paroisse de Bougival.

Hélas, la suite est moins positive… Toujours sans nouvelles de leur pasteur, les demandeurs se tournent une nouvelle fois vers leur curé à la fin janvier 2009.
Une fois encore ils sont reçus chaleureusement mais cette fois-ci, la réponse est claire et nette : il s'agit d'un refus d'aller vers une célébration de la forme extraordinaire du rite romain à Bougival.
En effet, après avoir interrogé son conseil paroissial et certains paroissiens, le Père Boidot explique qu’il ne « sent pas beaucoup d'enthousiasme » à avoir cette liturgie célébrée à Bougival.
Il sait très bien que certains paroissiens seraient enthousiastes mais il dit que ces paroissiens « font déjà leur vie ailleurs ».
Cela ne le motive pas à s'investir personnellement pour apprendre à célébrer cette messe.
A ce moment, même si le Père Boidot reste ouvert, la réponse est négative et il ne souhaite pas aller plus loin ; une sorte de « non d’ouverture » expliquent les plus naïfs.


POURQUOI UN AN POUR EN ARRIVER LA ?



LES REFLEXIONS DE PAIX LITURGIQUE



1 - Le Père Boidot est-il libre d'appliquer le Motu Proprio dans sa paroisse, non pas en droit mais dans la réalité pratique du terrain ?
Force est de reconnaître en premier lieu que l'attitude très politique de Monseigneur Aumônier, évêque de Versailles, face à l’application du Motu Proprio dans les paroisses, n’encourage pas vraiment les curés de son diocèse à aller de l'avant.
Cette attitude pourrait bien même freiner leur bonne volonté en ce domaine.
En effet, les refus autoritaires qu'il a opposés par exemple aux demandes des groupes des paroisses Notre Dame de Versailles et Saint Germain à Saint-Germain-en-Laye, qui ont été formulées chaque fois par plusieurs centaines de fidèles de la paroisse, sont la triste preuve que Monseigneur Aumônier est un frein à l'application des mesures de Paix et de réconciliation présentées dans le texte du Pape.
Renforcé, voir même contraint par la position intransigeante de son évêque, le curé de Bougival a donc préféré le confort mortifère (pour l'Église de demain) de l'immobilisme à l'ouverture pleine d'espérance à laquelle tout catholique sincère est appelé par Benoît XVI.


2 - LES OBJECTIONS MISES EN AVANT

a) Les fidèles ne le veulent pas…


Est-ce donc si difficile, Monsieur le curé, de passer outre la poignée de fidèles partisans de l'exclusion, attachés à leurs privilèges et qui font leur loi dans votre paroisse ?
Et même si les fidèles qui demandent la célébration d'une messe selon la forme extraordinaire du rite romain dans votre paroisse ne sont pas majoritaires, l'Église est-elle une démocratie ? Attendez-vous, Monsieur le curé, que l'ensemble de votre communauté soit enthousiasmé par la forme extraordinaire pour la mettre en place dans votre paroisse alors que vous savez que ce ne sera jamais le cas ?
N'avez-vous pas déclaré justement que vous n'étiez pas "le chapelain d’une communauté, mais le curé d’une paroisse unie" ?
Ne savez-vous pas que dans votre paroisse de Bougival, ce sont environ 34 % de vos propres paroissiens qui « n’ont pas leur vie ailleurs » et qui pratiquent dans votre paroisse qui assisteraient à la messe traditionnelle si vous la célébriez dans le cadre paroissial normal (sondage CSA 08 01 153 B réalisé les 24 et 25 septembre 2008 à la demande de Paix Liturgique : http://www.paixliturgique.com/WM_PLSITE/aff_lettre.asp?LET_N_ID=95)


b) Le manque de temps…

Là les lecteurs sont perplexes car une fois vous déclarez ne pas savoir célébrer la messe traditionnelle et une autre fois que vous aviez appris durant l’été…
Mais même si ce n'était pas le cas, vous savez qu'apprendre à célébrer cette messe, outre que cela renforcera la communion dans votre paroisse, ne vous demandera pas un investissement "en temps" considérable… surtout que vous ne voulez pas faire appel à un confrère, fut-il du diocèse.
Vous ne pouvez pas dire de bonne foi que ce serait à vous seul de célébrer et dans le même temps expliquer que vous n’avez pas le temps d’apprendre ; à moins que le « manque de temps » ne soit qu’une excuse plus présentable ?


c) L'absence de dialogue

Permettez-nous, Monsieur le curé, de nous interroger sur les moyens que vous utilisez pour œuvrer à l'unité entre tous les catholiques à laquelle nous appelle notre Saint Père.
Allons à l'essentiel.
Pourquoi renoncer au vrai dialogue ?
Pourquoi renoncer au dialogue fait loyalement à partir des questions mises à plat devant tous, sans intrigue ni secret ?
Asseoir un refus sur une pseudo opposition « des autres » alors qu'aucun vrai dialogue n'a été mené avec eux est une déloyauté.
Ne soyons pas naïfs ; le dialogue ne résout pas tout, mais nous savons d'expérience qu'il aplanit petit à petit les difficultés.
Le dialogue rend possible la connaissance mutuelle et même parfois l’estime et le respect réciproques.
C'est cette estime, cette meilleure compréhension de l’autre qui permet de mettre en œuvre des petits pas, des expériences par lesquelles petit à petit se trouveront les vraies et pérennes solutions et la vraie réconciliation.
Si on refuse le dialogue chrétien, on instrumentalise, on dresse les fidèles les uns contre les autres. Notre attitude a alors pour lamentable résultat que des chrétiens sont choqués non pas par la vérité mais par les horreurs et autres racontars qu'ils ont entendu dire de l'autre…
C'est comme cela que débutent les drames qui ont sali notre histoire.
Oui, le vrai dialogue est la vraie voie, alors que la politique du secret n'est jamais bonne.

Par ailleurs « attendre jusqu'à l'année prochaine » ne sert à rien si l'on ne profite pas du temps présent pour apprendre à prier ensemble et à mieux se connaître. L'expérience montre que ce n'est le plus souvent qu'un moyen dilatoire d'enterrer la question.


d) Et la culture du secret

Le Père Boidot a souhaité exclure Paix Liturgique - et les fidèles bienveillants l’ont écouté - comme si le fait que leur demande reste « clandestine » était une condition sine qua non pour être « reçue ».
Nous savons qu’à chaque fois que cette exigence a été posée, cela n’a jamais été fait dans une intention louable.
Au contraire, cette culture du secret n'a nulle part été honnête et partout où elle a été mise en œuvre, elle l’a été dans le but de rendre clandestines et ignorées de tous les demandes par peur que ces dernières ne recueillent une adhésion.


3 - L'action de Paix liturgique

Dans ce dossier comme dans quelques autres, nous nous trouvons devant une situation pénible :
Devons-nous parler ou devons-nous nous taire ?
Et si nous révélons le dessous du dossier ne trahissons-nous pas nos amis demandeurs ? Nous avons déjà répondu à cette question en affirmant que nul n'était "propriétaire" de sa demande, qui concerne des dizaines de familles.
Aussi, si certaines familles atteintes du syndrome de Stockholm préfèrent continuer à se taire et à trouver des excuses à ceux qui les prennent pour des imbéciles, d'autres veulent, dans la paix et la vérité, que les choses soient dites clairement et refusent les petits secrets des cercles d’initiés.
Ces personnes n’ont pas la volonté de « faire du bruit », elles savent simplement que le seul moyen d'aboutir est celui du dialogue ouvert et public et non pas celui des conciliabules peu chrétiens.
A ce titre, nous aimons nous rappeler les paroles prophétiques de Paul VI au sujet de l'indispensable " Dialogue de la charité " comme tout préalable à des décisions solides et durables.


4 - Aujourd'hui que faire à Bougival et partout où des fidèles se trouvent dans une situation semblable ?

Se taire et laisser faire ne contribuerait pas à la paix et à la réconciliation.
Il nous faut donc ouvrir d'autres voies : celle de l'établissement d'un vrai dialogue entre les paroissiens.
Maintenant il ne nous reste donc plus qu’à aller à la rencontre de nos frères paroissiens à Bougival et ailleurs pour dialoguer avec eux.
Ainsi, à la sortie des messes, aux grands moments de la vie de la paroisse, nous pourrons leur faire connaître notre souhait, leur montrer que nous sommes des hommes de paix qui ne souhaitons pas perturber leur vie paroissiale.
Nous pourrons ainsi leur dire que notre but est uniquement d'œuvrer à une vraie réconciliation et à l'unité dans nos paroisses.

Voilà ce que nous vous encourageons à faire.

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