Paix liturgique

Ces 20 et 21 septembre, comme un pendant spirituel aux Journées du Patrimoine, avait lieu la 8e édition du pèlerinage Feiz e Breizh (foi et Bretagne) autour du thème Krist, skouer a Garantez » – « Le Christ, modèle de Charité.

Plus de 2200 pèlerins - ils étaient 1900 l'an dernier - ont marché de la chapelle de Mangolerian à Monterblanc samedi matin jusqu'à Ste Anne d'Auray dimanche midi, s'arrêtant à Bieuzy Lanvaux samedi soir pour bivouaquer chez les sœurs coopératrices du Christ Roi. Le pèlerinage traditionnel a aussi clos le jubilé des 400 ans des apparitions de sainte Anne à Yvon Nicolazic en 1623-25.

Comme l'an dernier, l'imposante basilique sainte Anne d'Auray était trop petite pour des centaines de pèlerins qui ont assisté à la messe de clôture en rite tridentin célébrée par Mgr Centène, évêque de Vannes, depuis le parvis, après la procession animée par les Bagad, près de 70 musiciens jouant stoïquement bombardes et cornemuses sous l'averse orageuse, précédés par des porteurs de Kroaz Du, croix noire sur fond blanc, le drapeau breton historique.

Au rythme des cantiques en breton, de bannières et chapitres aux noms des saints Bretons, diocésains et fidèles des paroisses traditionnelles bretonnes, mais aussi de la FSSPX, croyants et moins croyants, désireux de découvrir la culture bretonne et faire l'expérience de la messe traditionnelle, ont marché à travers le Morbihan pour "glorifier Dieu, sanctifier les âmes et enraciner la Foi".

Feiz e Breizh est même devenu, les années aidant, un modèle - en Normandie, dans le Béarn, en Savoie ou en Provence, d'autres pèlerinages sont nés sur le modèle breton, ressuscitant les cantiques en langues régionales et la mémoire des saints locaux à travers les noms de chapitres. La Bretagne, ça vous gagne - et ils marchent.

Une croissance stable et durable

"Avec ces nouveaux pèlerinages régionaux, on pensait que la croissance du nombre de pèlerins ralentirait, mais elle reste stable et durable, de l'ordre de 10% par an", relève le communicant de Feiz e Breizh. "Les pèlerins viennent pour la culture bretonne, la Foi. Il y a beaucoup de jeunes, de familles - c'est plus simple pour elles qu'au pèlerinage de Chartres", et de fait la moyenne d'âge tourne autour des vingt ans.

"Au moment du COVID, avec les restrictions aux cultes, beaucoup ont compris que la Foi c'est important et ont envie de manifester leur attachement à notre Foi et notre culture".

Pour ces bénévoles de la région de Vannes qui font partie des soignants, "nous marchons depuis le début pour la force de la culture bretonne et de la Tradition". D'autres cimentent leur unité paroissiale et retrouvent d'autres paroisses tridentines - comme les 70 marcheurs en deux chapitres de Quimper.

Un groupe de pèlerins plus âgés - la cinquantaine - avec une bannière de St Ignace en breton - vient de Bieuzy Lanvaux, où ils se retrouvent à la messe et aux retraites de Saint Ignace des coopérateurs paroissiaux du Christ Roi. Pourquoi marchent ils ? "Pour la Foi", répond l'un d'eux, "Et pour la culture bretonne", dit un autre, "Et retrouver d'autres gens qui marchent pour la Foi", selon un troisième.

"Et Pour la paix liturgique", affirme un quatrième membre du groupe. "Le diocèse de Vannes est l'un des rares où tous les prêtres peuvent célébrer le rite qu'ils veulent sans problème, et l'inverse. Ici, on peut avoir un prêtre en soutane qui célèbre une messe Paul VI. La paix Liturgique existe ici, elle est établie et n'est pas contestée - c'est d'ailleurs l'évêque de Vannes qui célèbre la messe de clôture du pèlerinage ", développe-t-il.

Des marcheurs viennent de Saint Clément de Nantes - quoique à Ste Elisabeth le temps des travaux - "depuis plusieurs années pour l'unité de la Bretagne et la messe traditionnelle". Un autre marcheur, qui va à la FSSPX voire chez les sédévacantistes de Rennes, marche avec une jeune fille de Bruz près de Rennes, pas croyante.

"Je pensais trouver l'extase et une expérience spirituelle forte, ce n'est pas le cas, mais je suis très étonnée et édifiée par la foi profonde des tradis et ce notamment dans leurs familles", constate-t-elle entre les averses qui se déversent à l'arrivée. L'eau, généreuse, tombe aussi sur le journaliste de Libé qui cherchait s'il y avait des militants politiques dans le pèlerinage (!), mais aussi sur un écossais en kilt, un gallois serrant son drapeau dans les mains, et un groupe de pèlerins venus d'Anjou, une bannière de Notre Dame de Marillais dans les mains.

"Nous venons de Saint-Brieuc et faisons le pèlerinage presque depuis le début", relate un père de famille. "On l'a vu grandir, des gens s'y sont convertis, et maintenant la colonne est presque interminable. C'est beau !".

"Feiz e Breizh est un signe de résurrection"

Dans son sermon, Mgr Centène constate : "nous croisons tous les jours le cortège funèbre d'un monde sans Foi et privé de Dieu. La Bretagne terre de Foi peut nous sembler morte, mais Jésus peut venir à sa rencontre, lui dire Bretagne lève toi. La Bretagne a besoin d'être consolée, quand on voit tant d'églises vides, de communautés vieillissantes, tant de jeunes qui ignorent la Foi de leurs ancêtres.

Feiz e Breizh est un signe de résurrection, il met en exergue la culture et la tradition bretonnes pour transmettre la Foi. Ce n'est pas qu'une formule, mais une mission - faire de notre culture un terreau où la Foi peut s'incarner et se transmettre, liée à nos pardons, nos prières, nos clochers".

Et l'évêque de Vannes de conclure : "Nous sommes appelés à nous lever, à prier, à chanter. Il n'est jamais trop tard car le Christ est là parmi nous et dans nos vies. Que sainte Anne mère de Marie vous aide dans votre mission et qu'elle intercède pour vous".